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RESPONSABILITE D'UNE COMMUNE : LA CARENCE DANS L'USAGE DES POUVOIRS DE POLICE

 

                                                              Si vous subissez un préjudice du fait de l'inaction du maire de votre commune, vous pouvez en demander réparation.

 

Sur quel fondement ?

L’abstention de l’autorité de police administrative face à un trouble réel pesant sur l’ordre public sera considérée comme illégale et fautive.

La règle fixée par le Conseil d’Etat est que l’autorité de police administrative a l’obligation de prendre les mesures nécessaires et indispensables pour faire cesser un péril grave résultant d’une situation particulièrement dangereuse pour l’ordre public (CE, sect., 23 octobre 1959, Doublet).

La carence dans l’utilisation des pouvoirs de police est alors susceptible d’engager la responsabilité pour faute simple de la puissance publique (CE, 28 novembre 2003, Commune de Moissy-Cramayel).

Or, le maire tient de l’article L. 2212-1 du Code général des collectivités territoriales un pouvoir de police administrative général.

Cet article dispose que :

« La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment:

1o Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques, ce qui comprend le nettoiement, l'éclairage, l'enlèvement des encombrements, la démolition ou la réparation des édifices  (L. no 2008-1350 du 19 déc. 2008)  «et monuments funéraires» menaçant ruine, l'interdiction de rien exposer aux fenêtres ou autres parties des édifices qui puisse nuire par sa chute ou celle de rien jeter qui puisse endommager les passants ou causer des exhalaisons nuisibles  (L. no 2001-1062 du 15 nov. 2001, art. 46)  «ainsi que le soin de réprimer les dépôts, déversements, déjections, projections de toute matière ou objet de nature à nuire, en quelque manière que ce soit, à la sûreté ou à la commodité du passage ou à la propreté des voies susmentionnées»;

2o Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes accompagnées d'ameutement dans les rues, le tumulte excité dans les lieux d'assemblée publique, les attroupements, les bruits,  (L. no 2007-297 du 5 mars 2007, art. 18)  «les troubles» de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique;

3o Le maintien du bon ordre dans les endroits où il se fait de grands rassemblements d'hommes, tels que les foires, marchés, réjouissances et cérémonies publiques, spectacles, jeux, cafés, églises et autres lieux publics;

4o L'inspection sur la fidélité du débit des denrées qui se vendent au poids ou à la mesure et sur la salubrité des comestibles exposés en vue de la vente;

5o Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que les incendies, les inondations, les ruptures de digues, les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels, les maladies épidémiques ou contagieuses, les épizooties, de pourvoir d'urgence à toutes les mesures d'assistance et de secours et, s'il y a lieu, de provoquer l'intervention de l'administration supérieure;

6o Le soin de prendre provisoirement les mesures nécessaires contre les personnes atteintes de troubles mentaux dont l'état pourrait compromettre la morale publique, la sécurité des personnes ou la conservation des propriétés;

7o Le soin d'obvier ou de remédier aux événements fâcheux qui pourraient être occasionnés par la divagation des animaux malfaisants ou féroces. »

En outre, le maire est le titulaire de différents pouvoirs de polices spéciales (par exemple en matière de gestion des déchets sur le fondement de l’article L.541-3 du Code de l’environnement).

Comment ?

La carence du maire à user de ses pouvoirs de police pour mettre fin à un trouble à l’ordre public engage donc la responsabilité de la commune.

En premier lieu, il est nécessaire de démonter l’existence d’un trouble à l’ordre public. La nécessité d’agir du maire doit être prouvée. Car, le cas échant, le maire est en situation de compétence liée.

Par exemple, si des déchets sont abandonnés sur la voie publique de votre commune, le maire, titulaire de la police spéciale de gestion des déchets, est obligé d’agir pour mettre fin à ce trouble (CE, 18 décembre 2020, Commune de Six-Fours-les-Plages).

En deuxième lieu, la carence du maire doit être prouvée. Le fondement juridique de son obligation d’agir doit être apporté.

En troisième lieu, l’article R. 421-1, alinéa 2, du Code de justice administrative dispose que : « Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle ».

Aussi, vous aurez l’obligation d’adresser une demande d’indemnisation préalable à la commune, chiffrée. A défaut, votre recours devant le juge administratif sera irrecevable.

A noter : Vous pouvez demander réparation à la fois de troubles patrimoniaux (par exemple : la perte de valeur vénale de votre maison en raison d’une décharge sauvage à proximité) et de troubles extrapatrimoniaux (par exemple : une perte de sommeil en raison des dépôts sauvages à proximité durant la nuit).

A savoir : saisi de conclusions en ce sens, le juge administratif statuant sur un recours indemnitaire pourra enjoindre au maire de prendre les mesures nécessaires pour que le trouble cesse (CE, 27 juillet 2015, M. Baey c/ Commune d’Hébuterne). Autrement dit, le juge administratif n’ordonnera pas d’office au maire d’agir.