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MARCHE PUBLIC : LA PERSONNE PUBLIQUE PEUT-ELLE RESILIER UNILATERALEMENT LE CONTRAT ?

 

                      Le maire de la commune avec laquelle votre entreprise a passé un marché public a décidé de résilier unilatéralement le contrat. Est-ce une de ses prérogatives ?

 

Oui. Pourquoi ?

Les marchés publics sont des contrats administratifs, c’est-à-dire des contrats d’un type bien particulier, caractérisés par les nombreuses prérogatives dont bénéficie l’Administration :

- La personne publique peut user d’un pouvoir de modification unilatérale du contrat durant son exécution, à condition d’indemniser le cocontractant du préjudice causé notamment afin de maintenir l’équilibre financier du contrat (article L.6 du Code de la commande publique).

-  La personne publique dispose d’un pouvoir de sanction du cocontractant (CE, 31 mai 1907, Deplanque). Ainsi, elle peut par exemple infliger des pénalités de retard que le juge, saisi en ce sens, pourra moduler (CE, 29 décembre 2008, OPHLM de Puteaux).

- La personne publique peut prononcer une exécution aux torts et griefs du cocontractant (CE, 9 novembre 2016, Société Fosmax). L’administration ne résilie pas le contrat, mais en fait exécuter ou exécute elle-même les obligations aux frais du cocontractant défaillant (marché de substitution ; mise en régie).

- La personne publique peut se prévaloir d’une exception d’inexécution du contrat administratif (CE, 8 octobre 2014, Société Grenke Location).

- La personne publique peut résilier unilatéralement le contrat pour faute (article L.6 du Code de la commande publique). L’administration doit démontrer que l’inexécution est une faute d’une gravité suffisante pour justifier une résiliation du contrat. La résiliation est alors aux frais et risques du cocontractant.

- La personne publique peut résilier unilatéralement le contrat sans faute (CE, 2 mai 1958, Distillerie de Magnac-Laval ; article L. 6 du Code de la commande publique). Toutefois, ce pouvoir n’est pas discrétionnaire. Il ne peut s’exercer que sur le fondement d’un motif d’intérêt général (compris comme une irrégularité suffisamment grave pour que le juge du contrat eusse prononcé lui-même l’annulation ou la résiliation du contrat ; CE, 10 juillet 2020, Société Comptoir Négoce Equipements), dans le respect du principe de loyauté des relations contractuelles (CE, 28 décembre 2009, Commune de Béziers) et sous réserve d’indemniser le cocontractant. Par conséquent, la personne publique est fortement limitée dans son pouvoir de résiliation unilatérale en l’absence de faute du cocontractant.

En résumé, la personne publique pourra résilier le contrat administratif unilatéralement soit en justifiant d’une faute grave, soit d’un motif d’intérêt général suivi d’une indemnisation suffisante du cocontractant. A condition que, saisi en ce sens, le juge du contrat n’ordonne la reprise des relations contractuelles.